Le Droit pour les Photographes (avec Joëlle Verbrugge) - Destination Reportage

Le Droit pour les Photographes (avec Joëlle Verbrugge)

droit et photographie

C’est quoi le droit d’auteur ? Quelle est la différence avec le droit à l’image ? Que faire quand on a des questions comme ça ? Facile, on lit les excellents livres et le chouette blog de Joëlle Verbrugge !

Dans cette nouvelle vidéo, je partage avec vous l’entretien que j’ai eu avec cette photographe qui est également avocate.


Pour avoir des conseils et astuces pour vivre de la photographie, cliquez ici

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Transcription de la vidéo :

Rencontre avec…

Joëlle Verbrugge

Avocate photographe droit et photographie

Je m’appelle Joëlle Verbrugge, et je suis photographe depuis très longtemps, en termes en tout cas de hobby.

Professionnellement depuis 2009, et parallèlement à ça je suis avocate aussi longtemps et voilà donc j’ai créé entre à ces deux activités une chaîne qui s’appelle Droits et Photographies.

Bonjour, vous êtes bien dans une nouvelle vidéo Droit et Photographies.

Alors aujourd’hui je vais vous parler de photographie sportive, de contrefaçon, d’originalité des photos en rafale et de droits d’auteur sur les réseaux sociaux.

J’ai commencé à publier des bouquins et puis de fil en aiguille ce sera avec lui qui est là-dedans, soit derrière mon appareil photo soit derrière un dossier qui parle de photos soit d’écrire un bouquin qui parle de photos.

Pourquoi cette envie de partager ton savoir d’avocate ?

D’abord pourquoi je le fais ?

Parce que je me suis aperçue, au départ c’est venu parce que je répondais à des questions dans des forums et je m’apercevais que les gens qui sont pas juristes ont tendance à mélanger un peu les notions, ce qui est tout à fait normal. Et donc à force de répondre sans arrêt les mêmes choses à différents endroits je me suis dit que c’était stupide, que je perdais mon temps, autant tout centraliser.

Donc j’ai créé le blog pour ça, pour vraiment offrir un espace où il y avait des réponses qui étaient compréhensibles par tout le monde et ce qui m’amuse c’est de faire justement l’interface entre le langage juridique qui est un peu comme le langage des toubibs souvent un peu obscur est en tout cas qui peut faire peur et le langage que peut comprendre un photographe parce que parce qu’en allions mettre deux casquettes je parviens à l’expliquer le droit de façon à ce que lui puisse le mettre en pratique on va dire. Et ça, ça m’amuse beaucoup donc les bouquins ils sont tous fait de cette manière-là pour, on va dire, dédramatiser le côté juridique et arriver vraiment à faire quelque chose de compréhensible et progressif pour qu’on puisse y aller doucement parce que voilà le photographe n’aime pas ça donc ils ont vite une indigestion.

Alors que si on leur apporte quelque chose qui est un peu ludique et qui est vivant ça passe tout seul.

Pourquoi c’est important de s’intéresser au droit quand on est photographe ?

C’est important partout.

C’est que les gens ne se rendent pas compte que le droit est partout.

Et qu’on soit photographe ou constructeur ou artisan dans le secteur du bâtiment ou toubib ou n’importe quoi, le droit il est important partout.

Et peut-être que c’est le côté artistique du photographe, la fibre artistique du photographe fait qu’il dit « oui mais non moi ça ne m’intéresse pas j’ai pas envie je verrai plus tard. »

Et puis plus tard c’est souvent trop tard et quand c’est plus tard ben c’est un litige, ça coûte plus cher alors que moi je passe mon temps à dire aux gens « Prémunissez-vous, informez-vous. ».

    • Le but ce n’est pas de devenir juriste à la place des juristes.
  • Le but c’est de sentir quand il y a un danger.

Et si en lisant et en s’informant sur des affaires cette source que je fais, j’utilise la jurisprudence et des cas qui sont vraiment passés et j’explique pourquoi les photographes se disent « Ah oui, mais ça, ça m’est arrivé aussi. »

Et, quand en expliquant ça, les gens et les photographes à un moment l’attention est attirée par le fait que là je dois faire attention, que je dois faire quelque chose.

Si déjà je suis parvenu à ça je suis contente parce que parce que ça implique que le photographe se prenne en main et se dise « ok je signe pas n’importe quoi et je commence par m’informer si je suis pas très sûr. »

Et ça ça coûte beaucoup moins cher que d’aller jusqu’au litige et après de devoir payer des années de procédures ou bien de devoir abandonner en se disant « ouais la procédure c’est trop cher je veux pas et puis finalement je me suis assis sur mes droits et je vais le regretter longtemps quoi. »

Quel est le problème qui revient le plus dans tes consultations ?

Alors on va dire en termes de quantité de questions ça va être plutôt « on m’a volé une photo qu’est ce que je dois faire ? »

Pour ça j’en ai fait un livre complet parce que ça me permettait de raccourcir le temps où je commençais à répondre aux premières questions on va dire les plus importantes.

At après ça va être aussi le choix d’un statut parce que les statuts c’est compliqué, on en a parlé tout le repas.

Donc les gens ont du mal à faire la part des choses entre le statut régime fiscal etc

Et c’est aussi pour ça qu’il fallait que ce soit bien exposé de manière chronologique et que les gens, pas à pas, puissent aller vers ce qui leur conviennent vraiment parce qu’avant d’écrire ce bouquin j’ai vu arriver des gens à qui on avait conseillé des conseils qui auraient pu être bons s’ils avaient fait autre chose.

Mais là ils ont une activité particulière en fait ils se sont engouffré la tête la première dans un truc qui leur correspond pas du tout, avec des charges qui leur correspondent pas du tout non plus et surtout et des limitations où ils ne peuvent pas faire tout ce qu’ils veulent parce qu’on leur a dit par exemple « soit auteur c’est bon ça te coûte rien »

Oui mais quand on est auteur on peut pas faire grand-chose non plus. Enfin on peut faire plein de choses mais il faut le faire bien et on ne peut pas faire tout ce que l’artisan peut faire.

  • Donc si au départ on est bien conseillé, la passion on peut la vivre aussi professionnellement dans des conditions normales.
  • Si on est mal conseillé et qu’on prend un brouillon financier, la passion oui se transforme en catastrophe pour soi et pour toute la famille quoi.

Et comme les notions ne sont pas simple parce que les statuts, l’administratif, la fiscalité, tout ça c’est pas drôle.

Moi je n’aime pas non plus franchement mais en même temps si c’est pas bien expliqué on a plus de chances de se planter.

Quel conseil donnerais-tu à un photographe qui se lance ?

Se faire conseiller à toutes les étapes, toujours en gardant à l’esprit que la prévention ça c’est quelque chose qui, en France, n’est pas encore très bien intégrée, que la prévention coûte moins chère que de résoudre les problèmes après.

Donc par exemple le photographe qui se lance parce qu’il sait qu’il va avoir un très gros client pour qui il va pouvoir faire du corporate parce que le client c’est une multinationale et qu’il a des antennes partout et qu’il est prêt à signer n’importe quoi pour avoir le client, Et bien c’est pas toujours une bonne chose.

On peut garder le client tout en se faisant respecter, en ne signant pas n’importe quoi au départ et en faisant attention à ce qu’on signe bien on parvient à avoir une activité qui est pérenne dans le temps et qui va pas nous nous faire prendre un bouillon financier au bout de deux ans ou d’un an d’exercice.

Et c’est comme ça pour tout.

Que ce soit un photographe de mariage qui se lance et qui fait des contrats n’importe comment et qui oublie de rappeler certaines vérités à ses clients par exemple qu’on peut travailler tout un mariage pour 200 euros ça sert à rien. Il va peut-être le faire pendant… ça s’est vu beaucoup et les auto-entrepreneurs au début parce qu’ils n’avaient pas beaucoup de charges.

« Donc ok je fais un mariage à 250€ et bien c’est très bien et les photos sont peut-être magnifiques. »

Et le jour où ils ont fait tellement de mariages à 250 euros et qu’ils se sont épuisés à la tâche parce que ça vaut plus que ça et que c’est un travail de dingue, et qu’à ce moment-là ils seront obligés de changer de régime fiscal, là ils augmentent leurs tarifs comme par hasard il n’y a plus personne qui les appelle « Oh mais je comprends pas mais mes photos n’ont pas changé… ».

Et oui les photos n’ont pas changé, mais vos tarifs ont changé.

Si depuis le début vous vous faites respecter, après ça on viendra vous voir pour vos photos pas uniquement pour vos tarifs.

Et ça c’est l’éducation à faire et c’est ça qui me plaît en fait.

C’est le côté :

    • Éducation
    • Formation
  • Encadrement d’une activité

Bien plus que le côté litiges qui existe mais que je trouve moins gratifiant parce que la personne qui vient me voir parce qu’il commence son activité et parce qu’elle a besoin vraiment d’un suivi d’abord d’un choix de statut d’un encadrement pour ça, et puis dans l’encadrement juridique je trouve ça beaucoup plus gratifiant parce que c’est quelque chose qu’on construit ensemble plutôt que d’aller réparer les pots cassés de d’une situation qui a mal débuté ou qui s’est emmanchée dès le départ.

Questions des lecteurs du blog :

Y a-t-il une visibilité sur la simplification annoncée du régime AGESSA pour les auteurs photographes ?

Non pour l’instant c’est le plus difficile parce qu’ils ont beau annoncer des simplifications j’ai l’impression que le mot de simplification n’a pas la même signification dans l’esprit du législateur.

Alors j’ai vu passer en effet certaines choses dessus, il faut vraiment que je me plonge dedans parce que je dois faire la mise à jour justement de vendre ces photos qui est le bouquin dans lequel je parle de ça.

Apparemment ils veulent supprimer cette distinction entre assujettis et affiliés avec des conséquences que j’ai pas encore bien délimitées.

Donc simplification je crois pas.

Parce qu’il faut savoir que la loi est déjà très floue, qu’il y a plein de dispositions légales qui ne sont pas toujours très bien appréhendées même par l’AGESSA elle-même.

Et donc on peut envoyer la même question sous quatre noms différents à l’AGESSA, on aura quatre réponses différentes. Ce qui n’est pas normal.

Donc à partir de là j’oserais pas dire qu’on va simplifier non.

C’est trop tôt pour avoir une réponse simple d’abord parce qu’elle n’existe pas dans la pratique et d’autre part parce que je ne suis pas encore vraiment bien immergée dedans pour ce qui est du futur.

Pour le passé ça je peux t’en parler longtemps.

Questions des lecteurs du blog :

Est-ce que l’augmentation des plafonds micro à 66 000 euros s’appliquera aussi au micro-BNC AGESSA ?

Alors s’il y a une augmentation des plafonds, ça va s’appliquer à tous les régimes fiscaux simplifiés, donc aussi pour les auteurs qui sont eu micro-BNC.

Maintenant je sais pas si ce sera 66 000 ou plus.

Pour l’instant c’est trop tôt. Alors il y a des tas de bruits qui courent mais l’année dernière quand ils ont modifié les plafonds d’assujettissement il a fallu quatre fois que je change mon article, parce que pendant un mois entre mi-décembre et vers le 20 janvier ça a changé quatre fois. Donc lire des chiffres exacts maintenant je donne les chiffres début de l’année donc suffit de surveiller mon blog « droit et photos » et en début d’année je redonne les seuils qui sont un jour dès qu’ils sont à jour et voilà.

Parfois je fais un autre article en disant que j’en ai marre, que ça suffit, qu’il faut que ça arrête mais voilà il y a toujours un article en début d’année pendant le mois de janvier ou donnent les nouveaux seuils et je le fais toujours en lien aussi avec un comptable qui est spécialisé dans ces matières-là, qui s’appelle Eric Canot avec qui je travaille pour toutes ces questions-là, parce qu’à parfois des subtilités pour les auteurs que lui va mieux percevoir vraiment si on va dans les détails et qui va pouvoir m’expliquer de telle manière que ce soit clair aussi pour mes lecteurs à moi.

Questions des lecteurs du blog :

Est-ce qu’un artisan peut proposer des voyages photos ?

Alors l’artisan peut proposer des encadrements photos pendant un séjour mais il ne peut jamais proposer de prestations :

    • De transport
    • De logement
  • De nourriture

Parce que s’il fait ça il est obligé d’avoir un agrément d’agences de voyages qu’il n’a pas en général.

Donc attention puisque à des sanctions pénales aussi quand on s’improvise voyagistes et qu’on ne l’est pas.

Donc si l’artisan veut encadrer un voyage photos il n’y a pas de problème mais il faut qu’il collabore avec une agence photo qui va gérer toute la partie organisation du voyage mais l’encadrement lui- même il y a pas de problème ça il peut le faire.

Ou alors il fait par exemple, ça c’est possible aussi, un workshop par exemple, même pendant deux trois jours, mais où les gens se chargent eux-mêmes de réserver leur logement, payent leur nourriture etc.

Tant qu’il n’y a pas de prestations de logement, de transport, ou de nourriture ça va.

Mais dès le moment où il va jouer le rôle d’un agent de voyage il faut qu’il travaille avec un agent de voyage.

Ça c’est impératif et c’est une question notamment d’assurance pour les pour les voyageurs, enfin pour les élèves, parce qu’un accident en voyage ça peut coûter très très cher quoi.

D’une part des sanctions pénales en France, mais il y a aussi des vrais risques s’il y a un accident pendant le voyage.

Questions des lecteurs du blog :

J’ai photographié un enfant dans la rue et la photo va être diffusée dans un calendrier. Quels sont les risquent en termes de droit à l’image ?

Le fait que ce soit une photo d’enfant ça va pas changer la règle.

Ça va peut-être changer l’indemnisation mais ça va pas changer la règle.

La règle de base c’est qu’on distingue en fait en fonction de la nature de l’utilisation.

Donc là on est vraiment dans le commercial quand c’est un produit commercial comme un calendrier. C’est clairement ça.

À ce moment-là mais là règle est très simple.

C’est pas sans l’autorisation de la personne représentée, ou si c’est un mineur de ses deux parents. Donc la mère toute seule ça suffit pas non plus.

J’ai un bouquin qui parle de ça qui s’appelle « Photographie d’enfants : Droits et devoirs ». Et le livre « Droit à l’image et droit de faire des images »

Après les règles sont différentes si c’est une utilisation artistique par exemple pour faire une expo. Là c’est plutôt la personne représentée qui doit démontrer que l’utilisation de la photo lui cause un préjudice d’une « exceptionnelle gravité » dit la jurisprudence.

Et après enfin des règles différentes si c’est pour des aides d’informations.

Genre la presse d’une manière générale, tout ce qui est d’informer sur un événement il faut que

La personne soit concernée par l’événement qu’elle n’en soit pas la victime directe, enfin bon il y a plein de choses, il y a plein de petites questions qui ont été ajoutées par la jurisprudence au fil des années.

Mais un calendrier dans ta question ça c’est du pur commercial.

D’accord, et pour une exposition du coup ça passerait ?

Pour une exposition ça passera sans problème.

Sauf si la mère ou si les deux parents démontrent que la diffusion de la photo cause à leur enfant des conséquences d’une particulière gravité.

Un enfant qui joue il n’y a pas de danger.

Questions des lecteurs du blog :

Est-ce que cela pose problème si je vends des photos de mes clients (lors d’une exposition par exemple ?)

A mon sens il n’y a pas de difficultés tant qu’on reste dans la limite des 30 tirages numérotés et signés, ce que peut faire un artiste. Maintenant les juridictions ne sont jamais aussi précises.

Moi je rêve d’un juge qui un jour me dise très clairement « ok la jurisprudence qui dit que c’est à la personne représentée de démontrer les conséquences d’une particulière gravité ne s’applique qu’à partir du moment où on sort de ce tirage numéroté et que on passe dans le produit commercial. »

Mais ils ne vont jamais aussi précisément. Ce serait du rêve pour moi je pour évacuer la moitié de mes jurisprudences qui sont là en attente d’être analysées.

Parce que les jurisprudences ne vont pas là. Ils disent « ah oui mais voilà un calendrier c’est commercial ok passons l’autorisation. »

Je ne vois jamais arriver de litiges sur une vente de tirages numérotés et signés.

En analysant toutes les jurisprudences, je peux dire « écoutez à mon avis ça se passera comme ça tant que c’est dans la limite de ce que peut faire un artiste, c’est à dire justement l’exposition et la vente de tirages numérotés dans la limite de 30 à mon sens, en tout cas, je ne plaiderais avec conviction et je crois que je le gagnerais » parce que c’est logique on va dire.

Mais ce n’est pas parce que moi je le crois que je ne gagne vraiment. Je ne suis pas dans la tête des juges.

Donc malheureusement les décisions, les jugements et les arrêts ne vont jamais aussi loin dans la précision.

Ils disent « Oui c’est illégal parce qu’il y a eu tel ou tel préjudice mais ils ne fixent jamais les limites qui nous seraient vraiment utiles au quotidien. »

Questions des lecteurs du blog :

Mon agence diffuse une photo dont je n’ai pas obtenu les droits d’image des sujets, qu’est-ce que je risque ?

Non c’est l’agence qui risquerait quelque chose.

C’est à l’agence de déterminer ce qu’elle doit diffuser au pas diffuser.

Alors ce qui peut arriver c’est que par exemple une agence te dise « Ben tiens on sait que vous avez fait cette photo-là, par exemple tu n’étais pas envoyé pour eux mais t’as cette photo en stock et ils la veule vraiment, et toi tu devines qu’il pourrait y avoir un problème de droit à l’image, tu peux toujours toi, et c’est là que c’est utile justement la prévention pour les photographes, et tu peux toujours toi te couvrir par mail en disant « Attention, j’ai pas le droit à l’image sur cette photo, j’ai pas d’autorisation de la personne. Pour moi vous êtes très limite dans ce que vous voulez faire avec, vous assumez les responsabilités. ».

Et tu t’arranges pour qu’ils te le confirment avant d’envoyer la photo parce que comme ça si un jour ils sont attaqués par la personne et que eux t’attaques, ils te font intervenir dans la procédure, tu dis « stop, moi je vous ai averti plus le début, vous prenez vos responsabilités, c’est vous les pros. »

De toute façon c’est l’agence que la personne photographiée va poursuivre parce quand tu es sur une photo et que tu veux poursuivre quelqu’un tu vas poursuivre le plus solvable.

Tu vas prendre l’agence de presse plutôt que le photographe.

Et l’agence de presse pourrait l’imaginer mais le plus souvent elles ne le font pas mais pourrait imaginer de se retourner contre le photographe mais c’est pour ça que le photographe, toi, t’as intérêt à te prémunir en amont.

Si tu vois qu’il y a une photo, par exemple ils te disent « voilà on voudrait faire un article sur le pacs, un sujet potentiellement polémique », et toi tu as une photo, tu sais qu’elle a pas été prise dans ce cadre-là, tu dis « attendez, désolé, moi cette photo je ne l’ai pas prise par dans une manifestation » il y a le cas d’ailleurs.

Une photo manifestation, c’est une photo de la Gay Pride et on voyait un couple homosexuel sur un char, déguisé, mais tout à fait reconnaissable, et ils avaient vu la photo où ils apparaissaient plusieurs mois plus tard dans un article justement sur le pacs. Ils ont attaqué et on leur a dit « ah mais non mais vous étiez dans un défilé public vous avez accepté d’être photographié. »

Ils ont quand même gagné parce que le juge a dit « oui ils avaient accepté d’être photographié pour la Gay Pride mais pas pour un article sur le pacs parce qu’ils n’ont pas formulé ou voulu formuler d’opinion sur le pacs, donc vous avez détourné la photo de son contexte. » Hop vous payez.

Dans ces cas-là les procédures c’est quasiment toujours contre l’éditeur de presse.

Mais si toi tu as une photo et qu’on te dit « Tient on voudrait illustrer un article sur ceci » et toi tu as une photo qui les intéressent mais tu sais qu’elle n’a pas été prise là, tu leur mets textuellement.

Va pas te priver de la possibilité de vendre une photo, mais tu leur dis « Ecoutez, attention, j’attire votre attention sur le fait que cette photo a été prise à telle occasion, à vous de voir, vous prenez vos responsabilités en termes de droits à l’image. »

Mais le journal risque quelque chose aussi.

    • Oui le journal risque quelque chose mais ça c’est pas ton problème.
  • Le journal ou l’agence de presse mais ça c’est pas ton problème.

Toi du moment que tu as dit « je vous préviens, je vous ai avertis, vous prenez vos responsabilités. »

Il la publie, il assume.

En général c’est pas toi qu’on va attaquer mais si eux sont attaqués et qu’ils t’appellent en garantie dans la procédure, tu pourras dire, et bien sûr comme toujours même conseil tu gardes ça en PDF, tu stocke pas ça au fond d’un ordi dont tu sais pas s’il va planter un jour, tu le mets, ça c’est le conseil que je donne toujours, tu mets tous les documents qui concernent la photo avec le Tiff et l’euro et le jpg et tout ce que tu veux de la photo elle-même.

Bon je ne sais pas comment tu classes tes photos dans ton disque dur mais si tu as, par exemple, un répertoire par année, un par mois, un par jour et puis les jpg machin, tu fais un répertoire administratif ou cession de droits ou machin et puis tu rajoutes dedans cet échange de mails-là.

Parce que tu sauras, le jour où t’as un litige sur cette photo-là, qu’il suffit de retourner à l’endroit où la photo se trouve sur tes disques durs pour retrouver tout ce qui la concerne.

Questions des lecteurs du blog :

Que dit le droit d’auteur pour un photographe qui travaille pour une institution, pour l’armée par exemple ?

La loi a été changée en 2006, et on attend désespérément les arrêtés d’application donc c’est pas entièrement fixé et c’est surtout pas entièrement précis.

Mais en gros quand l’œuvre a été créé dans l’exercice des fonctions où d’après les instructions reçues, désolée mais l’article est un peu ancien, et que la diffusion se fait dans les besoins strictement limités d’une mission de service public à ce moment-là il y a une session de plein droit de tous les droits patrimoniaux.

Donc là le service public peut utiliser les photos à les reproduire sans limitation.

Par contre tout ce qui est droit moraux donc le droit au respect du nom notamment et le droit au respect de l’intégrité de la photo c’est-à-dire le droit d’interdire par exemple qu’on la recadre sauvagement, ça reste toujours sur la tête du photographe.

Il n’y a pas de cession.

Après la deuxième possibilité, c’est une exploitation commerciale par l’institution qui a demandé les photos, à ce moment-là il n’y a pas une cession de plein droit mais l’administration a un droit de préférence. C’est-à-dire « ok on veut faire par exemple des calendriers vendus au profit de notre institution mais c’est un produit commercial, elle peut, on va dire, exercer son droit de préférence, donc en gros le photographe n’a plus le choix sur le principe de dire oui à la cession de droits mais par contre il peut négocier des tarifs. Il faut une indemnisation.

Enfin troisième possibilité, quand l’œuvre a été créée en dehors de la mission, à ce moment-là on applique le droit d’auteur classique.

Ça, ça fait partie des choses qui normalement devraient être réglées par le fameux arrêté qu’on attend toujours.  Donc pour l’instant c’est le grand bazar.

Une cession de droits ne peut jamais être éternelle. Déjà logiquement dans son principe ce serait pas imaginable que du seul fait qu’il a été fonctionnaire pendant toute la durée de son service il cède ad vitam aeternam les droits de reproduction donc déjà sur ce point-là ça ne me paraît pas possible.

Mais voilà ça fait partie des matières qui sont super floues pour l’instant.

J’ai fait un dossier là justement dans ce genre d’image que je renseignais à celui qui a posé la question, donc j’ai fait quinze pages avec de la jurisprudence etc expliquée, mais cette jurisprudence qui reste vraiment dans les grandes lignes c’est-à-dire que je donne des cas qui correspondent aux trois grandes hypothèses que je viens d’évoquer.

Mais on va pas aussi loin et pour l’instant je n’ai pas vu passer justement ce problème que tu évoques du fonctionnaire qui parle à qui part à la retraite et qui veut récupérer ses photos.

Je l’ai entendu d’une personne que je connais mais j’ai pas vu passer de jurisprudence qui serait suffisamment fiable pour te dire oui ça se passe comme ça tout va bien.

Donc pour l’instant c’est un peu, ça fait partie des choses justement qui sont problématiques.  Il y a de nombreuses choses problématiques.

Questions des lecteurs du blog :

Comment faire pour obliger ses clients à respecter son droit d’auteur en indiquant le crédit photo ?

La seule manière, alors on n’est jamais sûr, la seule manière c’est déjà de ne pas se laisser faire en amont et puis après pas se laisser faire un aval.

  • En amont c’est en étant super clair quand on fait un devis.

Je ne sais pas, t’es contacté par une société qui veut des photos corporate pour sa com’, tu fais le devis, tu dois le faire, tu dois détailler les utilisations qui seront possibles.

Donc tu le détailles de manière vraiment précise. Site internet avec l’url machin, www.société.com,  vos réseaux sociaux, votre branding de marchandises machin, vos cartes de visite, vos flyers etc, décoration des stands professionnels ok tout ça tu mets. « Pour toute autre utilisation me contacter »

Et tu mets clairement dans tes conditions générales ou au bas de ta page « attention toute utilisation qui n’est pas prévue est considéré comme une contrefaçon »

Ça c’est en amont.

  • En aval.

Après si tu sais que c’est des utilisations pour le web tu peux très bien déjà mettre dans un contrat ou dans un devis le fait que les photos qu’ils utilisent pour le web devront être exclusivement celle que tu mets-toi dans un dossier et tu mets de la petite def et tu mets ton nom dessus, discret, mais tu mets ton nom dessus d’accord ?

Donc déjà tu leur facilites le travail parce que ceux qui vont nous dire « ouais mais on n’a pas eu le temps etc » non vous n’avez pas eu le temps vous n’avez pas pris le bon dossier. Là je vous ai mis un dossier qui s’appelle « pour le web » qui fait du je ne sais pas 800 ou 1000 pixels par je ne sais pas combien en 72 dpi avec mon nom dessus. Allez pas me dire que vous n’avez pas eu le temps c’est prêt. »

Et après quand tu vois qu’on utilise tes photos sans ton nom, gentiment « désolé mon nom n’est pas mis là, merci de rectifier » encore et encore. Après tu choisis d’assigner ou pas, ou de t’énerver vraiment ou pas, mais tu les mets en permanence devant les erreurs parce que si un jour le conflit dégénère eh bien tous ces petits mais là où pendant un an par exemple leur a dit « attendez, stop là, vous avez utilisé mon nom et sur les photos mon nom n’est pas dessus, moi je vous ai fait en plus un devis sympa parce que je me suis dit qu’ils allaient me faire de la pub aussi et là vous me privez toute possibilité de me faire connaître. »

Tous ces mails-là pareil tu les gardes.

Parce que ça va être l’accumulation aussi de petits manquements qui va faire que si un jour tu arrives devant un magistrat elle va dire « oui bon ça va là vous piétinez en permanence les droits de monsieur le photographe, ça va plus on arrête là quoi. »

Mais il faut vraiment faire de la prévention tout le temps.

    • Il faut le mettre dans le devis.
  • Il faut le remettre dans la facture ou la note d’auteur selon le statut qu’on a.

Quand on fait un contrat plus complet et c’est souvent utile justement quand on travaille souvent avec des sociétés qui envoient par exemple faire des photos dans différents points de vente dans différents sites, faire une sorte de contrat cadre qui dit « voilà, à chaque fois que je vais faire des photos pour vous on va appliquer toutes ces règles-là, et après on fait un avenant par séries de photos qu’on transmet, pour savoir exactement de quelle photo on parle. »

Mais chaque fois bien mettre le fait que c’est une obligation.

Alors c’est pas pour ça qu’ils vont mieux le respecter mais en même temps c’est pour ça que toi tu auras plus de moyens de leur dire stop je vous le dis depuis le début ne me dites pas que vous n’êtes pas au courant vous avez signé un devis ou c’est clair et net, vous avez ensuite payé sans réserve une facture ou une note d’auteur où c’était tout aussi clair et net et je vous l’ai dit plusieurs fois, et vous l’avez corrigé trois fois puis vous en avez eu marre.

Et bien stop, moi je vous ai préparé un dossier pour le web avec des photos qui seront prêtes, si vous recadrez pour enlever mon nom ou bien que vous utilisez les hauts de bef je suis désolé vous me causez un préjudice.

Il n’y a pas de formule miracle mais y’a plein de petits moyens de prévention qui au moins vont faire comprendre à l’interlocuteur que c’est peut-être pas avec vous qu’il faut jouer au plus malin quoi.

Et après oui il y a tous les systèmes, mais ça c’est plutôt pour les interlocuteurs qui sont pas nos contractants, les systèmes comme Imatag, Pixtrakk etc qui cherchent les photos, mais ça c’est plutôt pour identifier les contrefaçons de gens avec qui on n’a pas contracté, mais avec nos clients à nous il faut faire de la prévention tout le temps.

Photo de Une : http://www.milenap.com

Fred
Photoreporter professionnel pour la presse magazine (Paris Match, VSD, le Figaro Magazine, le Pèlerin, Géo Ado, Stern, etc...)